Au début, l'autoroute et l'ennui comme inspiration

7 juillet 2021
Passager dans une voiture qui roule à vive allure, mon regard s’attache à l’horizon. Le premier plan défile, bande abstraite mellant l’enrobé de la bande d’arrêt d’urgence, les plots en béton qui bordent certaines parties de l’autoroute et les premières herbes folles plus ou moins séchèes… Au loin se détache le paysage, rural, français. Une esthétique subjective, dont l’extraordinaire réside dans l’imaginaire commun, la promesse d’une beauté authentique, reflet du terroir des gens d’ici. La carte postale routière a-t-elle un jour tenu parole ?
L’évidente réponse qui germe dans les limbes de ma pensée à cet instant est sans détour : “Non, c’est moche !”
Un arbre, aussi commun soit-il, m’interpelle alors que la voiture ralentit à l’approche d’un engorgement. L’air est électrique, chaleur orageuse, stress de circulation, paramètres usuels d’un départ en vacances pour 2 semaines consenties l’été par son “bon patron”. J’ouvre la fenêtre et déclenche une prise de vue. La silhouette se détache, vert foncé sur un aplat à moitié vert pâle du pâturage rogné par le troupeau qui l’habite et le blanc-bleu pastel d’un ciel empli de nuages.
Ces premiers instants donnent naissance à une forme de photographie sensible et narrative, presque involontaire. Une manière de raconter une histoire en photo, depuis la banalité du bord de route.

Nouveau départ, route identique ...
21 juillet 2021
Cette fois j’en suis convaincu, les bords de route cultivent une beauté douteuse. Lignes hautes-tensions, éoliennes, industries, agro-industries, urbanisations intensives jalonnent le chemin avalé à 130 km/h.
Et pourtant, même dans ce décor, subsiste l’intuition d’un stage photo nature à ciel ouvert, où la contrainte devient moteur de création. Peut-on y retrouver le sens de sa pratique photo ?

Quand la contrainte devient créative
31 octobre 2021
Les veines secondaires des flux routiers m’appellent à multiplier les prises de vues. L’incertitude des rencontres paysagères, de la météo, de l’heure du déplacement titillent mes habitudes photographiques. La contrainte devient créative.
Ce rythme irrégulier ressemble à celui d’un workshop photographie et storytelling, où la narration émerge au fil du déplacement. Loin du studio, proche du vivant, de l’organique, du mouvement.

L'habitude mue en obsession
2 décembre 2021
Déplacement pro en train.
Exploitation agricole intensive, décharge à ciel ouvert, deux photos pour installer la série “Sur la route”.
Ici commence une immersion photo pour se reconnecter au vivant. Ce que la vitre du train dévoile, c’est aussi l’empreinte de notre époque.
D’horribles bords de routes, le mouvement du voyage, à travers une vitre devient obsessionnel.


Fin du voyage
15 avril 2023
Une nouvelle traversée d’Ouest en Est, vers la fin du voyage (ou plutôt de la recherche pour la série).
Le monde se révèle, il n’est pas binaire. À travers cet itinéraire photographique, nuance de paysages des plus insipides aux plus abstraits, en passant par les plus beaux, naît l’utopie du voyage idéal, vers des endroits où souffle le vent de la liberté à chaque moment, bulle temporelle distendue. Chacun invite à penser sa route. Ces images interpellent à propos du monde dans lequel nous évoluons et nous poussent à imaginer celui dont nous rêvons.

Cette série interroge notre manière de regarder le monde. Elle invite à ralentir, à se laisser traverser par les émotions, à écouter ce que les paysages nous murmurent. Elle pourrait être le point de départ d’un stage photo émotionnelle, un espace de reconnexion à soi, aux autres, au vivant. Ici, l’image ne cherche pas la perfection mais la justesse. Elle devient outil de présence, de lien, de transformation.