Classe verte à la ferme : immersion nature pour les enfants du béton

Cette classe verte à la ferme dans le Haut-Doubs a été bien plus qu’un simple séjour scolaire.

Paysage du Haut-Doubs autour de Rochejean pendant une classe verte
Paysage du Haut-Doubs autour de Rochejean pendant une classe verte à la ferme

Classe verte à la ferme, photo buissonnière et liens à cultiver

Il y a des endroits qui vous ramènent à vous-même.

Pour moi, Rochejean, dans le Haut-Doubs, c’est ce genre de lieu. Un centre d’hébergement pour groupes au cœur du village, une ferme à l’orée des sapins, et l’odeur du fumier mélangée à celle du bois mouillé. Le CLAJ y accueille depuis longtemps (1982 !) des classes vertes, des groupes en séjour éducatif, des colos « sans paillettes » mais pleines de vécu.

J’y suis revenu, cette fois, non pas comme animateur, mais comme photographe. L’appareil en bandoulière, le cœur un peu ému. Dans le car, deux classes de CM1 venues de Besançon, de l’école « Champagne » à Planoise, coincée entre la rocade, les tours et les chantiers. Des enfants de la ville dense, celle qui va vite et regarde peu. Pendant quatre jours, ils allaient vivre une expérience hors cadre, entre traite des vaches, cabanes dans les bois et temps de vie loin des écrans.

Moi, je suis venu pour témoigner. Avec mes images. Et avec ce besoin profond de dire à quel point la photographie peut être un pont entre le vécu et le sensible.

Départ en séjour classe verte depuis un quartier urbain de Besançon
Départ en séjour classe verte depuis un quartier urbain de Besançon

Du béton à la mousse

Le bus quitte les barres d’immeubles et grimpe lentement vers les épicéas.
On traverse les paysages du Haut-Jura. À l’arrière, ça chahute, ça s’étonne :
— « Mais y’a pas rien ici ? »
— « Regarde, une vache ! »

La campagne, pour beaucoup, c’est une abstraction. Un fond d’écran. Un décor lointain.
À Rochejean, la nature n’est pas en vitrine. Elle est sous les bottes, sur les doigts, dans l’air humide qui s’infiltre par les manches. Les enfants découvrent la vie paysanne, les gestes simples, les silences aussi. Certains râlent. D’autres s’émerveillent. Mais tous, à leur manière, se reconnectent.

Enfants découvrant la ferme pédagogique de Rochejean
Enfants découvrant la ferme pédagogique de la Batailleuse à Rochejean

Apprendre à vivre ensemble (autrement)

La vie en classe verte à la ferme, ce sont aussi les gestes du quotidien.
Partager une chambre. Attendre son tour. Mettre la table. Faire la vaisselle avec des camarades avec qui, parfois, on ne s’entend pas à l’école. On apprend, sans trop s’en rendre compte, à faire société.

À la ferme de la Batailleuse, les paysans sont aussi des animateurs. Ils racontent leur métier, leur lien au vivant, sans tableau ni PowerPoint. Il y a aussi les institutrices, les bénévoles, les animateurs du CLAJ. Des adultes présents, attentifs, et capables de poser un cadre clair quand il le faut. Une autre manière de vivre l’autorité : ni surplombante, ni distante, mais incarnée.

C’est ça, l’éducation populaire : créer les conditions d’un apprentissage par l’expérience, sans forcer. Juste en proposant un cadre. Et en laissant la vie faire le reste.

Activité ferme pédagogique : traite des vaches et des chèvres avec les enfants
Activité en classe verte à la ferme : traite des vaches et des chèvres avec les enfants

Cabanes, flaques et photo buissonnière

Pendant les randos, je glisse parfois quelques « pauses nature ».
Un tronc forgé par un pic. Le labyrinthe des larves de scolytes sous l’écorce. Une bouse encore tiède, témoin d’un passage récent. Rien de spectaculaire. Mais des choses à voir si on ralentit.

Ce sont ces moments-là que j’essaie de capter. Non pas pour « faire de belles images », mais pour documenter l’éveil. L’étincelle dans les yeux. Le corps qui se relâche. Le lien qui se crée — à soi, au groupe, à l’environnement.

C’est une forme de photographie sensible et narrative, une manière douce de raconter le monde, en pleine nature, loin des poses figées. Une photo buissonnière, qui accepte le flou, les ratures, les boues.

Cabanes en forêt lors d’un atelier nature en classe verte à la ferme

" Moi j’veux pas rentrer ... ! "

Le dernier jour arrive vite. Trop vite.
Les valises sont faites. Parfois un peu à l’arrache. Certains glissent une pierre, une plume, un souvenir. Il pleut encore. Et dans le couloir, on entend :
— « J’veux rester ici. J’veux pas rentrer. »
Ce sont les mêmes enfants qui avaient peur de la forêt la première après-midi.

Ce chalet du Souleret et cette ferme « la Batailleuse », ils s’y sont attachés.
Pas pour le confort, pour l’ambiance. Pour ce qu’ils ont pu être, ici, sans jugement. Pour les vaches, les chèvres, les cabanes, la soirée pizza au bord du feu de cheminée. Pour le fait de dormir ailleurs que chez soi.

Et moi, je les accompagne et surtout j’observe, je photographie, je m’émeus. Parce que ce que je vois là, c’est l’essentiel.

Derniers instants au chalet du Souleret en classe verte à la ferme

Ce que la pluie a fait pousser

Il a plu tout les jours pendant cette classe verte à la ferme. Et pourtant, j’ai rarement vu autant de lumière !
Ces séjours sont nécessaires. Encore plus pour ces enfants issus de quartiers denses, précaires, violents parfois. Ils ont besoin de cette respiration, de cette ouverture. Pas pour devenir des « petits écolos », mais pour devenir eux-mêmes, dans un autre cadre.

Ces quatre jours ont été pour moi une plongée dans ce qui fait sens :

  • transmettre sans imposer,
  • raconter par l’image ce que les mots ne peuvent pas toujours dire,
  • militer doucement pour une autre manière de faire société.

Alors je continue. À photographier. À accompagner. À défendre ce type de séjour.
Parce que vivre ensemble, ailleurs, c’est peut-être ça, la première pierre d’un monde moins sous tension ici.

Vivre ensemble pendant un séjour à la ferme
Vivre ensemble pendant un séjour à la ferme

Soutenir ceux qui rendent cela possible

Le CLAJ – Club de Loisirs et d’Actions de la Jeunesse – œuvre depuis plus de 40 ans dans le Haut-Doubs pour proposer des séjours éducatifs à la ferme, en montagne, au vert.
À Rochejean, ils accueillent groupes, classes, familles, toujours dans l’esprit de l’éducation populaire.
En savoir plus et soutenir leurs actions : www.claj-batailleuse.fr

Éducation populaire en action avec les animateurs du CLAJ à Rochejean
Éducation populaire en action avec les animateurs du CLAJ à Rochejean

Pour aller plus loin

Je propose des ateliers de photographie nature et storytelling, pour celles et ceux (classes, groupes ou personnes) qui veulent apprendre à raconter une histoire avec leurs images, sans artifice.

Contactez-moi pour organiser un atelier ou découvrir les prochaines immersions.

2 réflexions sur “Classe verte à la ferme : immersion nature pour les enfants du béton”

  1. Aline Loiseau

    Bravo pour cet article purement éducation populaire, nature, bienveillance et vivre ensemble.
    Vous avez raconté cette expérience avec justesse.

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